Publication : ‘Perspectives on Contemporary Irish Theatre’

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Cher.e.s ami.e.s de Radac,

nous sommes très fiers de vous annoncer la publication de l’ouvrage Perspectives on Contemporary Irish Theatre: Populating the Stage, co-édité par nos collègues Anne Etienne et Thierry Dubost.

En voici les détails :

1 Introduction 

Anne Etienne and Thierry Dubost

 

Part I Dramaturgical Approaches

2 Innovation Meets Evocation: Tom Mac Intyre’s Plays at the Peacock Theatre 17

Marie Kelly

3 From Dementia to Utopia: Tragedy and Transcendence in Frank McGuinness’s The Hanging Gardens 39

Matthieu Kolb

4 Women and Scarecrows: Marina Carr’s Stage Bodies 59

Mary Noonan

5 McDonagh’s “ True, Lonesome West ” 73

Maria Isabel Seguro

6 The Physical and Verbal Theatre of Michael West 91

Nicholas Grene

7 A Dark Rosebud on the Irish Stage: Ailís Ní Ríain’s Tallest Man in the World 99

Thierry Dubost

 

Part II Practitioners ’ Voices

8 Death of a Playwright 115

Geoff Gould

9 Looking Back and Forward on Sound Design: Irish Theatre Transformed 123

Cormac O ’ Connor

10 Lightning in a Bottle: The BrokenCrow Experiment 133

Ronan FitzGibbon

11 Interview with Bríd Ó Gallchoir 141

Anne Etienne, Thierry Dubost and Bríd Ó Gallchoir

12 Interview with Pat Kinevane 153

Anne Etienne and Pat Kinevane

13 Interview with Mark O’Rowe 165

Thierry Dubost, Anne Etienne and Mark O ’ Rowe

14 Enda Walsh, in Conversation with Ger FitzGibbon 175

Ger FitzGibbon and Enda Walsh

 

Part III Political and Societal Reflections on the Stage

15 Slump and Punk in Ray Scannell’s Losing Steam: Envisioning Corcadorca 193

Anne Etienne

16 Through a Glass, Darkly: Priests on the Contemporary Irish Stage 213

Virginie Roche-Tiengo

17 Populating the Irish Stage with (Dis)Abled Bodies: Sanctuary by Christian O’Reilly and the Blue Teapot Company 231

Katarzyna Ojrzynska

18 Queering the Irish Stage: Shame, Sexuality, and the Politics of Testimonial 249

Cormac O’Brien

19 A Gendered Absence: Feminist Theatre, Glasshouse Productions and the #WTF Movement 269

Patricia O’Beirne

Index 291

 

Colloque : Le Corps du traducteur, Université Paris 8, 22-23 Novembre

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Cher.e.s ami.e.s de RADAC,

voici le programme d’un colloque qui se tiendra les 22 et 23 novembre prochain. Le programme détaillé de ce bel évènement est disponible en cliquant ici.

Nous espérons vous y retrouver nombreux !

Voici les résumés des interventions qui auront lieu :

Sirkku Aaltonen – Understudy, Standby, Swing – the Translator as a Member in the Theatre Ensemble

Finland is one of the countries where translated texts have always formed a substantial part of the repertoires in the theatre. In the 20th century their share has stabilised to about a half, but it may come up to even two thirds, of the plays accessible to Finnish theatre audiences.

I have edited two compilations of the views of Finnish theatre translators of their work. The first one was a collection of articles by translators, translating foreign plays into Finnish and the other by foreign translators, translating Finnish plays for Swedish, English, Spanish, Russian, Slovak, Hungarian, French, Chinese, German etc. theatre audiences. In my presentation, I will explore the discourse of the role of theatre translators as they themselves see it. As my material, I will use 25 articles from the two books. I have read the articles through Critical Discourse Analysis, in particular as outlined by Norman Fairclough and Teun Van Dijk. The important concepts in the analysis will be discourse (directing our comprehension of reality and forming versions of selected events for us), repertoire (certain recurrent patterns), theme (large abstract units of meaning, topic (concrete and event-based building blocks of themes), and metaphorical stories (detailed accounts of current events with the aim of symbolizing the themes). It became obvious that theatre translators need to see themselves in many roles: as stage writers, directors, actors, audiences, and sometimes also theatre agents, promoting the plays to theatre practitioners. In my presentation, I will focus on the views of the translators of their role in making the text visible on stage as well as of the collaborative nature of theatre translation and their experience of it.

Doublure, remplaçant, comédien polyvalent : le traducteur, membre de l’équipe théâtrale

En Finlande, les textes traduits ont toujours représenté une part substantielle du répertoire théâtral. Au XXème siècle, cette part en est venue à former la moitié des pièces montrées, mais elle atteint parfois jusqu’aux deux tiers de celles proposées au public finlandais.

J’ai coordonné deux ouvrages regroupant les points de vue des traducteurs de théâtre finlandais sur leur travail. Le premier était un recueil d’articles de traducteurs de pièces étrangères vers le finnois, et l’autre rassemblait les réflexions de traducteurs de pièces finnoises vers d’autres langues : suédois, anglais, espagnol, russe, slovaque, hongrois, français, chinois, allemand, etc. Dans ma présentation, j’étudierai le discours porté sur le rôle des traducteurs de théâtre, tel qu’eux-mêmes le perçoivent. A cet effet, je m’appuierai sur 25 articles extraits de ces deux livres. J’ai lu ces articles à la lumière de l’analyse critique du discours, définie en particulier par Norman Fairclough et Teun Van Dijk. Les concepts importants de mon analyse seront le discours (qui oriente notre compréhension de la réalité et crée nos versions de certains événements sélectionnés), le répertoire (certaines formes récurrentes), la thématique (unités de sens abstraites et étendues), le sujet (blocs thématiques concrets qui reposent sur des événements), et les récits métaphoriques (récits détaillés de l’actualité dans le but de rendre les thématiques symboliques). Il m’est apparu évident que les traducteurs de théâtre sont obligés de se concevoir dans plusieurs rôles : scénographe, metteur en scène, acteur, public, et parfois aussi agent artistique, faisant la promotion des pièces auprès des professionnels du métier. Je me concentrerai ici sur les manières dont les traducteurs envisagent celui de leurs rôles qui consiste à rendre le texte visible sur scène, ainsi que sur leur expérience de la nature collaborative de la traduction théâtrale.

Celia Bense Ferreira Alves – Ethnographie d’une recherche-création

Le développement de la recherche création interroge les méthodes d’appréhension des processus de production de la recherche tout comme ceux de la création. En prenant pour objet le projet de recherche-création Traduire la performance/performer la traduction auquel j’ai pris part depuis sa conception et qui est en cours de développement, cette communication se propose d’interroger les différents processus à l’œuvre par le biais de la méthode ethnographique. Je montrerai la manière dont chaque étape du développement du projet questionne le recueil scientifique de données et de leur analyse: définition des prénotions et mise à distance du savoir immédiat, appréhension de la situation, de son contexte et de ses participants, des interrelations et des modalités de coopération, prise en compte de la variabilité du temps et de l’espace, construction d’un vocabulaire approprié.

The ethnography of a research-creation project

Research-creation as a developing category explores the methods with which we apprehend the production processes both of research and creation. Choosing as my subject the research-creation project Translating performance/performing translation, in which I have been involved since the very beginning and which is now in progress, I will use the ethnographic method to explore the different processes at work in it. I will show how the scientific collection of data and their scientific analysis are questioned in each developing stage of the project : pre-notions are defined, a distance is taken from unmediated knowledge, the situation, context and participants, their interrelations and cooperation modalities are all apprehended, the variability of time and space is taken into account and a relevant lexical field is established.

Géraldine Berger et Christophe Daloz – L’adaptation pour la scène: une rencontre artistique entre deux langues maternelles, un mouvement d’une culture à une autre

L’adaptation pour la scène est une rencontre entre deux langues et deux cultures. Il s’agit d’une rencontre plus que d’une traduction. Il s’agit d’un mouvement, il s’agit d’aller vers le texte, le comprendre le plus profondément possible et le réinventer pour aller vers l’autre langue. C’est un ensemble de mouvements, de cheminements, pour aller d’une langue à une autre, d’une culture à une autre. C’est une rencontre, un accueil, une ouverture vers l’autre, une compréhension intuitive d’une langue maternelle à une autre. C’est un respect infini, de l’auteur, de la langue, de la culture, c’est un geste créatif qui réinvente les mots pour mieux en saisir le sens. C’est une sorte de magie qui s’opère entre deux mondes. C’est un acte fondamentalement poétique et politique (cf. Barbara Cassin).

Adapting for the stage as the artistic encounter of two mother tongues and as a progression from one culture to another

Adapting for the stage involves the encounter of two languages and two cultures – their encounter rather than their translation. It consists in progressing towards a text and understanding it as deeply as we can, and then in reinventing it so as to turn towards the other language. Adapting for the stage is essentially a series of movements and developments from one language to another and from one culture to another. It is an encounter, a way of welcoming and being receptive to others, an intuitive form of understanding between two mother tongues. It involves boundless respect for authors, for language and culture. Adapting for the stage involves a creative gesture that reinvents words to apprehend them better. It creates a kind of magic between two worlds; it is a fundamentally poetic and political act (cf. Barbara Cassin).

Céline Frigau Manning – Théâtre de la traduction. Corps pluriels, corps singulier d’un collectif de traduction théâtrale universitaire

« Peut-être est-ce seulement dans la salle de répétition », suggère David Johnston, « que le traducteur prend pleinement conscience des potentialités de la représentation – pour le meilleur ou pour le pire – que renferme son texte[1]. » Mais qu’advient-il lorsque la salle où l’on traduit est aussi une salle de pratique théâtrale ? Lorsque les traducteurs, réunis en collectif, ont recours à leurs propres corps pour traduire et ouvrir le jeu, pour composer deux corps collectifs – celui du texte final de leur traduction, celui du collectif de traduction qu’ils composent ? De quelles manières leur modus operandi, qui s’invente et se renouvelle au fil du travail, convoque-t-il des approches scéniques et devient lui-même matière à théâtre ?

Cette réflexion s’appuiera sur l’expérience de La Langue du bourricot, collectif fondé à l’Université Paris 8 en 2012, avec pour but de traduire des dramaturges italiens contemporains encore inédits en France tels que Matteo Bacchini, Antonio Moresco et Emma Dante. Cette expérience a donné lieu à la publication de quatre traductions dans la collection Nouvelles Scènes des PUM, ainsi qu’à une création scénique, Prova di traduzione, présentée notamment lors du festival Universcènes de Toulouse (mars 2015) et au Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis (octobre 2015). Je partirai ici de mon point de vue de fondatrice et coordinatrice du collectif pour interroger les processus mêmes du travail, la place de la pratique scénique et le faisceau de relations qui s’instaurent ce faisant entre les corps en traduction et celui, singulier, du collectif lui-même.

The Theatre of Translation. Singular and Pluralised Bodies in a University Translation Collective

“It may be only in the rehearsal room,” suggests David Johnston, “that the translator becomes fully alive to the potentialities of performance – for better and for worse – that are encoded into his or her own playscript.” What happens, however, when the place in which we translate is also a theatrical studio? When we as translators, working as a group, rely on our own bodies to translate and to open possibilities for performance, thus creating two collective bodies – one being the final version of their translation, the other the collective which they form? In what way does our modus operandi, as it is invented and modified throughout our work, involve theatrical practices, and becomes itself the raw material for performance?

This reflection will be based on the experience of a translation collective, La Langue du bourricot, founded in 2012 at the University of Paris 8, which translated contemporary Italian playwrights, as yet unpublished in France, such as Matteo Bacchini, Antonio Moresco, and Emma Dante. This experience gave rise to the publication of four translations in the collection Nouvelles Scènes at the Presses Universitaires du Midi, and to an original creation entitled Prova di traduzione, performed for instance at the Universcènes Festival in Toulouse (March 2015) and the Théâtre Gérard Philipe in Saint-Denis (in October 2015). I will explore here, from my perspective as founder and coordinator of this collective, our working processes, the emphasis we placed on stage practice, as well as the network of relations created between bodies in translation, and the singular body of the collective.

Lily Robert-Foley and Virginie Poitrasson – Face à face: réflexions sur une expérience de traduction entrecroisée

How does the translator’s body interact with the translation itself? Lily Robert-Foley and Virginie Poitrasson will present what is partly a performance, using video and sounds, and partly a discursive in-practice talk mixing English and French languages.

Face to face: thinking about an experience in intersecting translation

Comment le corps du traducteur interagit-il avec la traduction? La présentation de Lily Robert-Foley et Virginie Poitrasson réunira une performance audiovisuelle et une réflexion pratique et discursive mêlant l’anglais et le français.

Olivier Schetrit – L’acte de traduction au sein d’une œuvre artistique :  Traduction, accessibilité, tradaptation, re-création,…

La langue des signes est une langue tridimensionnelle, l’espace de signation engage le buste, le visage, les bras du locuteur et en cela, elle est très différente de la langue orale. Sa caractéristique première : elle se dessine dans l’espace, et le corps du signeur est l’instrument de cette élaboration cognitive et linguistique.

Sur scène, lorsque la langue est impliquée dans un acte de création, elle transcende le corps, le dépasse. L’espace de signation n’est plus contraint à une expression formelle, la langue se réinvente, s’émancipe.

Qu’en est-il de l’acte de traduction dans une création bilingue langue des signes / français ? Quel impact sur le corps, sur la langue du traducteur ? Qu’en est-il du lien création et traduction lorsque deux langues, deux cultures, deux représentations du mondes sont en « jeux » ?

The act of translating within a creative work: Translation, accessibility, tradaptation, re-creation…

Sign language is a three-dimensional language: the signing space involves the arms, torso and face of the speaker, making it very different from vocal language. Its first attribute is that it is conveyed visually in dimensional space and the signer’s body is the instrument of this cognitive and linguistic process.

On stage, when language is involved in an act of creation, it transcends the body and goes beyond it. The signing space is no longer restricted to formal expression; language then reinvents itself and becomes emancipated.

What happens to the act of translation in a bilingual French/sign language production? How are the translator’s body and language impacted? What becomes of the link between creation and translation when two languages, cultures and representations of the world come into “play”?

Carole-Anne Upton – ‘These shy acts of creation’: Thoughts on the radical and the conservative in translation for performance.

 My focus is the extent to which theatre made in translation can be a ‘shy’ or alternatively a radical act of creation. I will look at the way in which context-specific translation choices are determined according to the relationship of the individual translator to the original text and moreover the parameters of the specific translation/production goal. Consideration of some common strategies and techniques by which directors and ultimately actors embody text in moving towards performance during the rehearsal process may even help to shed light on the practice of translation. My suggestion is that the principles and values that guide textual translation choices may actually be quite different from those that come to the fore through physicalisation strategies in rehearsal, and that a creative tension between the contours of a translated text and the topography of performance is an essential if problematic feature of the process of (re)creating theatre in translation. I will look at how the text is handled differently by translator and actors/director and ask whether bold rehearsal practice, with its capacity for radical play, can overcome the essential shyness of translation.

« These shy acts of creation » : du radical et du conservateur dans la traduction théâtrale

Dans cette présentation, je chercherai à savoir dans quelle mesure la traduction théâtrale est un acte de création « timide » ou, au contraire, radical. J’observerai la façon dont les choix de traduction liés à un contexte spécifique se déterminent à la fois par la relation qu’entretient le traducteur au texte original, et par les paramètres liés à l’objectif de la traduction/production. La pratique traduisante sera même susceptible d’être éclairée à l’aune de certaines stratégies et techniques qu’emploient couramment les metteurs en scène et, in fine, les acteurs pour incarner le texte au cours des répétitions dans leur cheminement vers la représentation. J’émets l’idée que les principes et les valeurs qui mènent aux choix de traduction des textes peuvent, de fait, se révéler assez différents de ceux qui se manifestent en répétition lors de la mise en jeu physique, et qu’une tension créative entre les contours du texte traduit et la matérialité de la performance est une caractéristique essentielle, quoique problématique, du processus de (re)création du théâtre en traduction. J’analyserai la façon dont le texte est manipulé différemment par les traducteurs d’une part, et les acteurs et metteurs en scène de l’autre ; je me demanderai ensuite si des pratiques de répétition audacieuses, qui permettent un jeu radical, peuvent venir à bout de la timidité caractérisant la traduction. 

[1] David Johnston, « Securing the Performability of the Play in Translation », in Sabine Coelsch-Foisner et Holger Klein (dir.), Drama Translation and Theatre Practice. Berne, Peter Lang, 2004 : 25-38, cf. 34.

Review : ‘The Sky is Safe’, Eden Court Theatre, Inverness, Septembre 2017

The Sky is Safe (1)

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Matthew Zajac, Eden Court Theatre, Inverness, 18 septembre 2017

Production Dogstar Cie (2) en tournée en Écosse après le festival d’Édimbourg 2017

Dana Hajaj : AMAL / MURAT /…

Matthew Zajac : Auteur, GORDON …

Ben Harrison : Metteur en scène

Nihad Al Turk : Scénographe

Genèse de la pièce :

À l’automne 2012, Matthew Zajac prend un avion pour Istanbul où il doit faire une étape de courte durée, environ quarante-huit heures, afin de recevoir un visa pour entrer en Iran où il va tourner dans un film historique. Ce qui devait être une formidable expérience cinématographique, très exaltante pour cet acteur de théâtre, s’est avéré plein d’imprévus et de rencontres aussi fortes qu’inattendues.

Pour comprendre ce qui lui est arrivé, il est nécessaire de rappeler le contexte historique de l’époque.

L’année précédente, l’ambassade de Grande-Bretagne à Téhéran a été pillée par une foule en colère. La mission diplomatique britannique a dû se retirer du pays et, conjointement, des diplomates iraniens ont été expulsés du Royaume Uni. En raison de l’absence d’ambassade iranienne à Londres, les employeurs de Matthew ont décidé de revoir tout le processus d’obtention du visa en passant par leur ambassade d’Istanbul. Le jour de son arrivée dans la capitale turque, Matthew apprend, par son contact à Téhéran, qu’il doit y rester quelques jours de plus car son visa lui sera délivré avec quelque retard. En fait, il faudra neuf jours avant qu’il soit convoqué pour le retirer à l’ambassade iranienne. Là, sur place, on lui demande le N° d’autorisation qu’il était censé avoir reçu et qu’il n’avait jamais eu. Deux heures plus tard, un coup de téléphone d’Iran lui annonce que le visa vient de lui être refusé en raison de sa nationalité britannique.

Ses rêves de premier rôle envolés, Matthew est rentré en Écosse, riche de ce qu’il avait vu et vécu, et les germes d’une nouvelle pièce en tête.

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The Sky is Safe : quelle ironie tragique !

Depuis 2012, la tragédie syrienne n’a cessé de connaître des scènes d’horreur où civils et militaires, nationaux et internationaux, fanatiques et non-fanatiques, se combattent en une guerre complexe où intérêts religieux, politiques, économiques etc. se combinent et s’amalgament, tout en rejetant des millions de déplacés sur les routes de l’Orient et de l’Occident.

Pays charnière entre l’Asie et le Vieux Continent, la Turquie a depuis longtemps été un des centres géo-politiques du monde dans son entre-deux, et Istanbul où Matthew a dû attendre ses papiers officiels est un lieu de passage, de transfert et de transit, où se croisent idées et idéologies, où se font maintes transactions commerciales et où se retrouvent beaucoup de gens en fuite, jetés sur les chemins de l’exode.

Istanbul est le décor extracontextuel (hors scène) de la pièce. Toutefois,  son cœur et les rues qu’il irrigue ont été filmés dans leur quotidien plein de vie et d’activité, et ce hors champ s’invite sur le plateau, projeté sur un grand écran, sorte de mur posé à mi-chemin entre l’avant et l’arrière scène. S’y joignent, des images d’incendies qui rendent compte de la guerre et de certains événements relatés. Symboliques d’explosions ou de portraits schématisés, des graphismes se superposent à elles en un mélange presque surréaliste. Sur ce support écranique de communication visuelle, défilent aussi des traductions : lorsqu’Amal parle ou chante en arabe, le texte anglais s’inscrit en simultané.

Le décor se compose de grands pans verticaux de couleur ocre sur lesquels se devinent les contours de la ville qui créent un effet de perspective que viennent couper de leur horizontalité frontale l’écran à cour et, dans son prolongement, le dessus d’une table renversée au centre. Cet accessoire est utilisé avec deux chaises pour les scènes d’intérieur. Avec l’effet d’optique créé par la projection filmique, les acteurs donnent parfois le sentiment de déambuler dans le dédale des rues de cette ville, entre ses murs factices, grâce à une marche sur place chorégraphique. Le même procédé leur permet de se retrouver dans quelque bar ou restaurant local près de Stambouliotes filmés, au cœur de leurs conversations animées. Pour les scènes intimes de la brève relation entre Gordon et Amal, un drap à même le sol suffit à créer un espace minimaliste.

Pendant son séjour dans la capitale turque connue pour son intense activité, Matthew est tombé sur un autochtone particulièrement dérangeant qui a tenu à l’entraîner dans les rues autour de la grand’ place Taksim. Cet homme a donné vie au personnage de Murat et à l’ouverture de l’intrigue principale où il met en présence Gordon et Amal. Les deux acteurs (Matthew Zajac et Dana Hajaj) jouent tous les rôles et c’est Dana qui endosse aussi celui de Murat qui disparaît au moment ou Amal apparaît. Ses costumes féminins passent de vêtements occidentaux à la mode (elle est très élégante avec ses talons aiguilles et ses longs cheveux noirs défaits), au hijab et abaya, et jusqu’au nikhab imposé par sa fuite et par sa rencontre avec des intégristes ; ils remplacent ainsi la tenue moderne du jeune Murat, en jeans, baskets et la casquette rivée sur le crâne. Gordon, venu négocier des affaires, porte un costume décontracté chic, un vrai « gentleman » comme le répète Murat de façon ostentatoire. Plus tard, Matthew revêt une tenue militaire et porte une arme lourde quand il incarne les hommes aux check-points ou sur le parcours des migrants. Au décor sonore stambouliote répondent les langues et les accents de Matthew et d’Amal révélateurs de leurs origines et de leurs différences, de l’Orient et de l’Occident.

Cette pièce repose sur notre histoire contemporaine et sur les histoires individuelles de réfugiés tels que ceux que Matthew a rencontrés à Istanbul ou celles relatées par l’intermédiaire de l’O.N.G. Small Projects Istanbul (3) qui n’a de cesse de trouver des fonds et des solutions pour les aider à commencer une autre vie.

La pièce donne voix à ces femmes violées et torturées, à leurs époux ou leurs fils assassinés par des soldats et des guerriers souvent à peine sortis de l’enfance. S’y racontent les longs mois de souffrance et de marche dans les montagnes quand le voyage par la route jalonnée de check points devenait impossible. Survivre… pour soi et pour ses enfants quand un sniper n’a pas eu raison de leur présent et de leur improbable futur. Amal et toutes celles qu’elle incarne disent leur douleur et leur espoir, comment les voisins ou les écoliers turcs parfois les rejettent parce qu’ils sont d’ailleurs, comment l’Homme, prédateur, est capable de profiter de tout dans ces situations de guerre, comment au sein de leurs propres familles des Syriens se déchirent dans leurs choix politiques contraires ; la guerre civile s’amplifie de dimensions internationales.

Cette pièce est un cri, une lamentation et une dénonciation ; c’est le récit d’une  déplacée qui a souffert dans sa chair, dans sa tête et dans son âme, comme tant d’autres. Elle espère en des jours meilleurs mais sa vision des choses est tout’ à la fois caustique, désespérée et positive. Elle sait ce qui a été annoncé il y a plus de mille ans, connaît les hommes et leur cruelle perversité, mais sait aussi que demain sera pire encore ; c’est écrit.

Danièle Berton-Charrière

POURPRE, IHRIM-CLERMONT, UMR 5317, CNRS.

(1) https://www.youtube.com/watch?v=8WM8z2P0VZ0, https://www.youtube.com/watch?v=EJf8nFQFZMk.

(2) http://www.dogstartheatre.co.uk/production-history.html

(3) https://www.smallprojectsistanbul.org/

Publication : ‘Théâtres du Réel en Angleterre et en Ecosse depuis les années 50’ de Danielle Mérahi

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Cher.e.s ami.e.s de RADAC,

nous sommes très fier de vous annoncer la publication de l’ouvrage de notre collègue Danielle Mérahi, Théâtres du Réel en Angleterre et en Ecosse depuis les années 50, aux éditions de l’Harmattan.

Vous en trouverez tous les détails à cette adresse !

Tennessee Williams: Paris et New York : ‘Suddenly Last Summer’, ‘The Glass Menagerie’

 

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Suddenly Last Summer

Pièce rarement représentée en France, Suddenly Last Summer  fut jouée à La Cartoucherie, au Théâtre de la Tempête, en 2009 dans une mise en scène de René Loyon. Revoici ce drame à l’Odéon-Théâtre de l’Europe dans une mise en scène de Stéphane Braunschweig, directeur du théâtre et auteur du décor, avec Luce Mouchel dans le rôle de Mrs Venable, Marie Rémond dans celui de Catherine Holly et Jean-Baptiste Anoumon dans celui du Dr Cukrowicz.

Un épais rideau de scène en plastique translucide zébré de traces d’eau dans lequel se perdent, autour d’un halo, quelques irisations de vert et de bleu, laisse deviner quelques sièges. Le regard du spectateur se heurte à ce rideau déplaisant sur lequel sera déversée, au tout début du spectacle, une coulée d’un liquide rouge-sang. La pièce se déroule dans un lieu unique, un jardin-jungle monumental qui envahit le plateau. Des lianes noueuses, cordes à nœuds tentaculaires, et des racines entremêlées pendent des cintres. Un énorme tronc d’arbre, tronc de baobab est bien mis en évidence. Un arbre immense trône au centre du plateau, des fleurs rouges gigantesques, sans doute insectivores, sortent du sol, des feuilles de palmier complètent l’ensemble. A l’avant de la scène  sont alignées quelques chaises, blanches et froides, inhospitalières. Leur couleur rappelle le blanc du monde médical. Une chaise-longue et quelques fauteuils de jardin sont  ajoutés à cette chaîne de sièges. Cris aigus d’animaux de toutes sortes, sifflements. Lumière crue que rien n’atténue.

Décor luxuriant, démesuré, criard. La mise en scène écrase : point d’humidité tropicale chère à La Nouvelle Orléans, point de moiteur étouffante, point de Sud poisseux alors  que l’on attendait, au dire de Tennessee Williams, un jardin « steaming with heat after rain.» Il ne s’agit pas d’un jardin qui transpire après les pluies tropicales. Les personnages évoluent dans ce jardin qui fait office de salon et de cellule aux murs capitonnés d’un hôpital psychiatrique. Les voix sont écrasées par les micros et les paroles prononcées dans les coulisses ne sont guère audibles.

Violet Venable qui éprouve de sérieuses difficultés à se déplacer et passe le plus clair de son temps dans un fauteuil roulant, apparaît sur scène debout. Elle se promène, au bras du médecin,  sur un chemin qui serpente dans cet effroyable jardin tropical. La démarche est hésitante, chancelante parfois, mais les talons hauts ne gênent guère et la cane n’est pas d’une grande aide. Cette femme âgée, cette richissime douairière autoritaire, au « withered bosom », souligne Tennessee Williams, est ici une femme entre deux âges, en bonne santé, svelte, vêtue d’une robe en dentelle de couleur champagne et portée avec une courte veste  assortie.

La pièce est hantée par Sebastian Venable, personnage principal de la pièce, mort « l’été dernier » dans des circonstances mystérieuses et  troubles et dans des conditions épouvantables. Les névroses de Mrs Venable et de Catherine Holly s’affrontent donc autour de ce qui s’est passé là-bas, cet été-là, à Cabeza de Lobo, dans un huis clos qui s’est installé au milieu de cet étrange jardin. Voyage au bord de la folie, au bord de l’abîme. Catherine et Violet Venable sont enfermées chacune dans leur vérité, dans leur non-dit dont elles ne sortent pas. Aucune ouverture n’est proposée au spectateur. Logorrhées, long bavardage de la famille qui se déchire. Les protagonistes, tous quel qu’ils soient, nous entraînent dans leur propre sphère psychique. Jouer la folie n’est pas chose aisée, mais celle-ci ne fait pas illusion, le douloureux et long accouchement lasse, tout est surligné, l’esprit du spectateur vagabonde. Le Dr Cukrowicz, figure humaine, tout en sobriété, est à l’écoute.

Le spectacle se concentre sur le face à face entre Violet Venable et  Catherine, l’une voulant se venger de l’autre,  Catherine cherchant à faire la lumière sur ce qui s’est vraiment passé à Cabeza de Lobo : comment Sebastian est-il mort ? La phase finale de cette tragédie laisse sous- entendre que le plus fou ou la plus folle n’est peut-être pas celui ou celle que l’on pourrait croire. Tel est le  diagnostic du Dr Cukrowicz. Cette histoire hideuse (la mort de Sebastian)  a été extirpée du cerveau de Catherine.

La pièce est maîtrisée, le spectateur assiste essentiellement à une performance d’acteurs. La densité du texte et l’écriture tranchante de Tennessee Williams nous emmènent dans les hallucinations et dans la folie des personnages. Les dialogues laissent transpirer cette folie. Marie-Claire Pasquier et Jean-Michel Déprats, dans leur nouvelle traduction, nous y aident bien.

http://www.dailymotion.com/video/x5dl1wh Soudain l’été dernier/Interview Stéphane Braunschweig

 

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The Glass Menagerie

De l’autre côté de l’Atlantique, The Glass Menagerie est jouée au Belasco Theatre de New York dans une mise en scène de  Sam Gold,  avec Joe Mantello dans le rôle de Tom, Sally Field dans celui d’Amanda, Madison Ferris dans celui de Laura et Finn Wittrock dans celui de Jim O’Connor.

Les personnages évoluent sur une scène quasi-nue, dépourvu de décors : le mur du fond est un mur de briques peintes en noir, traversé par un réseau de tuyaux  fixés là, sciemment. Une table de cuisine pliante et quelques vilaines chaises occupent le centre du plateau. Non loin, sur la gauche, des étagères en acier, de type industriel, pour la vaisselle. Un panier à bouteilles de lait fait office de porte-disques et la ménagerie de verre, à l’avant du plateau, semble bien dérisoire. La photo du père disparu on ne sait où, agrandie, bien mise en évidence-celui-ci est le personnage principal de la pièce-est absente. Le cadre est austère, la lumière est crue. Les acteurs pénètrent dans la salle restée éclairée par une porte latérale et rejoignent la scène en gravissant un petit escalier. Tom et Jim le gravissent avec aisance et légèreté, Amanda hésite : elle pousse un fauteuil roulant occupé par Laura, celui-ci l’embarrasse. Quant à Laura elle-même, elle se trouve ici en situation de handicap alors que, selon Tennessee Williams, cette infirmité ne doit être que suggérée. Assise donc dans son fauteuil roulant, elle s’en extirpe, se jette assise sur la première marche aidée de sa mère qui replie ses jambes molles et sans vie. L’exercice est répété sur les  deux marches suivantes. Elle tente ensuite d’avancer en exécutants de lents mouvements  de reptation. Ayant ainsi retrouvé l’appartement familial, il lui faut être réinstallée dans son fauteuil par d’autres. Le spectateur se sent mal à l’aise, la scène est douloureuse, voire pitoyable. Il sait que l’actrice, Madison Ferris,  cette jeune femme de 25 ans,  est affectée de dystrophie musculaire.

The Glass Menagerie

The Menagerie est « a memory play. » Tom le narrateur, le jeune homme, ici homme d’un certain âge, cheveux poivre et sel, évoque le passé en prologue et en épilogue, ou du moins celui d’Amanda, celui de Laura et le sien. Il revisite son existence avec une mère possessive qui le harcèle et une sœur fragile (peut-être comme du verre). Les acteurs semblent expérimenter des situations  en dehors  de l’espace williamsien. Amanda se retrouve sur les genoux de Tom. La Dame du Sud, « ménagère de cinquante ans » chaussée soit de chaussions soit d’escarpins à talons  a oublié son accent. Elle le retrouve, pour une courte période de temps,  lorsqu’elle évoque les « gentlemen callers », les galants qui lui rendaient visite sur  la plantation au temps de sa jeunesse. La robe portée à cette occasion et remise pour recevoir Jim O’ Connor,  n’est plus ici qu’un tutu long de couleur rose Barbie. Les illusions qui font partie intégrante de la pièce ne sont plus là. Le lyrisme est absent. La déconstruction est déconcertante, la pièce est radicalement revisitée. Où le metteur en scène veut-il en venir ? Il s’agit d’un révisionnisme dramatique. Sam Gold est souvent en désaccord avec le texte. Le personnage de Laura est grotesque et pitoyable. Condamnée à passer une partie de son existence dans un fauteuil roulant, comment Amanda peut-elle l’envoyer faire des courses ?  Comment peut-elle errer dans la ville de Saint-Louis ou encore  esquisser quelques pas de danse, d’une valse, « La golondrina », (qui raconte la solitude d’une hirondelle égarée, thème prémonitoire), dans les bras de Jim ?

Ce passé est vu par le metteur en scène comme un cauchemar. Pendant toute la représentation, Laura est assise soit par terre soit dans son fauteuil roulant  ou encore procède à des manœuvres sur la scène. La portée de la pièce est réduite, la crédibilité est mise à mal, l’émotion est absente, l’intimité a été gommée. Nous sommes loin de l’univers de Williams. Tout est exagéré à travers la mémoire de Tom. Point de poésie, point de magie, point d’artifice. Que de déceptions !

http://www.youtube.com Sally Field returns to The Glass Menagerie

 

par Brigitte Gabbaï

 

Appel à Contributions CDT 32

Le renouvellement du genre policier sur la scène anglaise et américaine contemporaine

Le « polar » dans sa forme romanesque, télévisuelle et cinématographique connaît depuis longtemps un franc succès populaire et critique alors même que le théâtre policier semble souffrir d’une réelle désaffection. Le théâtre est en effet le grand absent des ouvrages consacrés au genre policier tandis que l’appellation même de « théâtre policier » s’avère problématique, ne faisant figure que de collocation malheureuse, empruntée au genre canonique qu’est le roman policier.

Est-ce à dire que le genre policier n’a pas sa place sur la scène de théâtre ? Le whodunit, c’est-à-dire l’intrigue policière dans sa forme la plus traditionnelle, a pourtant bien connu son heure de gloire dans les années 1940 et semble encore aujourd’hui susciter l’engouement du public, comme en témoigne l’éternel succès de The Mousetrap d’Agatha Christie, jouée à Londres depuis 1952. Le théâtre policier serait-il alors uniquement synonyme d’un théâtre de variétés dont les motifs éculés expliqueraient l’approche souvent parodique qui en est proposée aujourd’hui ?

Nombreux sont pourtant les dramaturges anglais et américains contemporains à renouveler le genre, le déclinant par exemple sous une forme métathéâtrale (The Real Inspector Hound, 1968, Tom Stoppard), éthique (Orphans, 2009, Dennis Kelly), politique (Three Kingdoms, 2013, Simon Stephens) ou encore métaphysique (Suicide in B flat, 1976, Sam Shepard), pour ne citer que quelques exemples.

Ce numéro de coup de théâtre s’intéressera au dépoussiérage du genre qui s’opère sur la scène anglaise et américaine contemporaine, permettant à cette forme obsolète de s’épanouir au-delà des frontières du West End ou de Broadway.

Le volume de Coup de théâtre accueillera des articles explorant les pistes suivantes :

– La réécriture des genres canoniques que sont le whodunit et le roman noir (hardboiled fiction).

– La distinction entre culture populaire et culture des élites, highbrow et lowbrow, et l’appartenance du théâtre policier à l’une ou l’autre de ces catégories.

– La distinction entre roman, film et théâtre policier en termes d’esthétique et de réception.

– La spécificité nationale ou au contraire le brouillage des frontières entre thriller « à l’américaine » et mystery play « à l’anglaise ».

– L’influence de l’esthétique cinématographique. On pense par exemple au travail de la compagnie anglaise Punchdrunk ou à An Inspector Calls (mis en scène par Stephen Daldry au National Theatre en 1992 et repris en 2016) dont la scénographie emprunte à l’esthétique du film noir.

– Le renouvellement du genre à l’aune du développement des nouvelles technologies et de la réalité virtuelle (à l’instar de The Nether de Jennifer Haley joué aux Etats-Unis en 2013 avant d’être repris au Royal Court à Londres puis dans le West End).

– Les passerelles entre théâtre policier et un autre genre populaire qu’est la comédie musicale (que l’on constate par exemple dans City of Angels,1989, de Cy Coleman et David Zippel qui rend hommage au film noir des années 1940).

 

Merci d’adresser vos propositions d’article (500 mots max.) accompagnées d’une courte biographie avant le 31 mai 2017, aux deux responsables de publication :

Susan Blattès (Université Grenoble-Alpes) : susan.blattes@univ-grenoble-alpes.fr

Aloysia Rousseau (Université Paris-Sorbonne) : aloysia.rousseau@orange.fr

Les articles, de taille maximale de 40 000 signes et rédigés en français ou en anglais, devront être envoyés aux directeurs de publication au plus tard le 30 septembre

Bien cordialement,

Susan Blattès et Aloysia Rousseau

Hélène Catsiapis

helene

Chers amis,

Le bureau de RADAC a l’immense tristesse de vous annoncer le décès d’Hélène Catsiapis, mercredi 15 février. Hélène était membre fondateur de RADAC et secrétaire de 1983 à 2007. Tous ceux qui avaient eu le plaisir de la rencontrer connaissaient sa gentillesse et disponibilité. Elle avait mis beaucoup d’énergie et d’enthousiasme au service de notre association. Elle avait participé à l’organisation de nombreux colloques, journées d’étude à Paris et à Lille notamment. L’équipe qu’elle formait avec Claude et Nicole s’arrangeait pour que  chaque événement scientifique soit accompagné d’un (ou de plusieurs) moments de convivialité : spectacles, repas, cocktails. Hélène avait joué aussi un rôle très important dans la création et diffusion de la revue Coup de Théâtre. Nous savions que nous pouvions toujours compter sur elle pour soutenir nos projets, même ceux qui étaient assez éloignés de ses propres intérêts en matière de théâtre anglophone. Ses préférences allaient plutôt vers la comédie, celle de Noël Coward notamment.

Hélène va nous manquer énormément mais nous ne l’oublierons pas, en essayant de continuer le travail de l’association avec le même sérieux et le même esprit convivial.

Susan Blattès, Présidente de RADAC

Compte-Rendu : « No Man’s Land », retransmission du National Theatre Live

 

No Man’s Land, de Harold Pinter, mis en scène par Sean Mathias, avec Ian McKellen, Patrick Stewart, Owen Teale et Damien Molony. Donné au Wyndham’s Theatre à Londres jusqu’en décembre 2016, retransmis dans les cinémas britanniques et à travers le monde en décembre 2016 et janvier 2017.

Après une tournée aux Etats-Unis et en régions en Grande-Bretagne, la série de représentations à Londres, sur la scène du Wyndham’s Theatre, est un retour aux sources pour la célèbre pièce de Harold Pinter. Plus de quarante ans après sa première mise en scène, la version que propose Sean Mathias navigue habilement entre le présent et le passé, pour le plus grand plaisir du public londonien et de la critique.

1(Illustration 1. Ian McKellen/Spooner, Damien Molony/Foster, Owen Teale/Briggs, Patrick Stewart/Hirst. Photographie : Johan Persson)

 

La pièce donne à voir l’arrivée de Spooner (Ian McKellen), invité chez Hirst (Patrick Stewart). Les divagations de Spooner occupent l’essentiel du premier acte, face à un Hirst perdu dans ses pensées, ailleurs — comme le remarque ouvertement son invité : « You’re a quiet one. It’s a great relief. Can you imagine two of us gabbling away like me? It would be intolerable » (325). Spooner, le vagabond, est ici sûr de lui, il plaisante sans cesse et n’hésite pas à titiller son hôte, se moquant aussi bien de sa calvitie que de son langage. Le comique s’estompe pourtant lorsque Hirst, affaibli par les quantités d’alcool absorbées, quitte la pièce à quatre pattes. C’est alors que Foster (Damien Molony) et Briggs (Owen Teale), hommes de main directement sortis des années soixante-dix, font leur apparition. L’on retrouve ici la menace et les jeux de pouvoir typiques des premières pièces de Pinter, et les deux hommes ne sont pas sans rappeler Goldberg et McCann dans The Birthday Party. Avant la fin du premier acte, Hirst réapparaît sur scène, en robe de chambre et en chaussette (au singulier, il n’en porte qu’une), visiblement déboussolé. Il n’est plus l’hôte d’une luxueuse maison de Hampstead Heath, mais un vieil homme vulnérable, qui s’endort sur une chaise alors que les autres personnages parlent, tant il est perdu dans un univers où ses rêves, ses souvenirs et le présent se brouillent.

2(Illustration 2. Patrick Stewart/Hirst. Photographie: Johan Persson)

Dans le deuxième acte, les rôles s’inversent : c’est cette fois Spooner qui est sceptique, alors que Hirst reconnaît en lui un certain Charles, qu’il aurait côtoyé à Oxford. Spooner ne se laisse déstabiliser qu’un instant, et c’est finalement avec entrain qu’il se plaît à jouer ce rôle, surenchérissant même sur son hôte dans les souvenirs de leurs diverses prouesses amoureuses de l’époque. Pourtant, l’évocation du passé prend à nouveau un ton plus grave lorsque Hirst suggère que l’on prenne soin des morts comme l’on aimerait que l’on prenne soin des vivants (« And so I say to you, tender the dead, as you would yourself be tendered, now, in what you would describe as your life » 383). L’émotion — accentuée également par le gros plan choisi pour la retransmission au cinéma — met en avant la sensibilité toute particulière de Hirst, qui semble lui-même hanté. Jusqu’à sa conclusion, la pièce alterne entre cette tragique conscience de la mortalité et la dimension plus comique du personnage de Spooner. Dans de longues tirades, le vagabond propose ses services à Hirst, vantant ses mérites de cuisinier aussi bien que de secrétaire. Hirst l’ignore froidement, et la pièce s’achève avec un tableau, mettant en scène le « no man’s land » du titre : le temps est désormais venu d’un hiver sans fin, auquel les personnages trinquent avant le noir final — « You are in no man’s land. Which never moves, which never changes, which never grows older, but which remains forever, icy and silent » (399).

La scénographie (Stephen Brimson Lewis) contribue grandement à la construction de cet espace suspendu du no man’s land : malgré les références précises dans le texte au quartier de Londres de Hampstead Heath, la moitié supérieure de la scène donne à voir les cimes des arbres d’une forêt, plongés dans une obscurité bleutée seulement traversée par le souffle du vent, donnant une atmosphère éthérée et mystérieuse à l’ensemble. De plus, la pièce elle-même n’a rien d’une maison traditionnelle, elle est circulaire, comme un hommage possible à la première mise en scène, celle de Peter Hall en 1975, qui avait également choisi de matérialiser ainsi cette bulle dans laquelle évoluent les personnages.

3(Illustration 3. Adaptation télévisée)

Pourtant, malgré cette dimension éthérée, la pièce revendique son appartenance aux années soixante-dix. Des costumes aux accessoires, elle regorge d’indices permettant de la rattacher à cette période : Spooner porte un badge du CND, Foster et Briggs sont vêtus de cuir marron, de chemises à motifs, et chaussés de talons cubains, le petit-déjeuner est présenté à la mode de l’époque… Etrangement — mais peut-être finalement sans surprise — la pièce se place exactement dans cet entre-deux, ce no man’s land entre un passé remémoré et un présent toujours renouvelé.

La bande-annonce créée par le National Theatre Live est disponible sur Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=i9RA6B9FOKM

La pièce est à lire dans le troisième volume des œuvres de Pinter : Pinter, Harold. “No Man’s Land.” Plays Three. London: Faber and Faber, 1997. 280–350.

Adeline Arniac

JE « La Jeunesse au théâtre », Université Lille 3, 2-3 février 2017

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Cher(e)s ami(e)s de RADAC,
notre collègue Claire Hélie nous informe de la tenue de deux journées d’étude consacrées à « La Jeunesse au théâtre » qui auront lieu les 2 et 3 février prochains à l’Université Lille 3. En voici le programme détaillé : la-jeunesse-au-theatre-programme

« Un Chêne » de Tim Crouch, Théâtre de l’Elysée à Lyon, 16-21 janvier

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Cher(e)s ami(e)s de Radac,

Un Chêne, de Tim Crouch, dans une mise en scène de Catherine Hargreaves, sera créé au Théâtre de l’Elysée à Lyon du 16 au 21 janvier prochain.

Plus d’informations : http://lelysee.com/spectacle/?id=269